De Sintra à Òbidos 

De Sintra à Òbidos 

Nous quittons Sintra ragaillardis de ce temps de repos, linge propre dans les sacoches et de belles images de la région en mémoire. Nous avons pris le temps de réorganiser les sacoches pour délester Jeff. J’ai de mon coté fait quelques recherches pour avoir des options de camping sur la route et éviter une autre mauvaise surprise à ce sujet. Ils fonctionnent tous sur le principe de premier arrivé, premier servi, ce qui est bien correct, car si nous ne sommes pas trippeux de l’arrache totale, le fait de ne pas réserver d’avance nous convient bien. Nous repartons donc avec le sentiment d’être davantage préparés.

Nous reprenons la route qui mène aux châteaux vus la veille. C’est beau, il y a moins de trafic et ça descend. Nous avançons bien. Jusqu’à ce que nous arrivions à une route goudronnée qui laisse place à… un chemin de pierres envahi par la végétation. Nous marchons un peu pour vérifier que le chemin mène bien à une route, puis pour nous assurer que nous pouvons passer avec les vélos. Remonter tout ce que nous venons de descendre est assez dissuasif de rebrousser chemin. Après analyse de la situation, nous poussons les vélos à travers ce chemin abandonné. Le reste de la journée se passe en suivant des routes secondaires, nous permettant d’éviter les gros axes et donc le trafic. Le dénivelé est assez marqué, mais nous prenons chaque montée comme elle vient et ça va bien. Nous sommes parfois récompensés d’un beau point de vue sur une plage au bas des falaises. 

Nous atteignons Ericeira. Aucun problème pour y camper : plusieurs emplacements pour tente sont disponibles. Les vans et les camping-cars sont bien plus nombreux. Ce soir-là, nous sommes un peu envieux des installations tout confort de nos voisins. Nous convenons que nous n’avons pas encore trouvé notre rythme de croisière, nous sommes fatigués alors que nous avons fait une trentaine de bornes. Nous tentons de nous convaincre que c’est normal, nous sommes encore en adaptation. 

À Ericeira, où nous restons 2 nuits, nous rencontrons une famille qui voyage en camping-car depuis 11 mois. Les enfants sympathisent, ainsi que les parents. Apéro sur la plage, baignade et fortifications pour l’océan fabriquées par les enfants. Ces derniers sont très contents de se faire des copains. Ils font régulièrement référence à leurs amis de l’école et de la garderie. Nous pouvons constater l’attachement aux amitiés à leur jeune âge, ou même probablement plus largement au connu et à la routine. Cela semble être partagé par les enfants de nos nouveaux copains. D’ailleurs, nous aussi, nous sommes bien contents de passer une soirée de socialisation.

Au départ d’Ericeira, nous savons qu’une grande montée nous attend : plusieurs personnes intriguées par notre moyen de transport en famille sont venus nous jaser et nous en ont avertis. Nous partons préparés. Et ça se passe bien, malgré le temps que cela nous prend. Les voitures sont toujours relativement courtoises avec nous, s’arrêtant au besoin pour nous doubler avec une bonne distance de sécurité. 

Au départ de Santa Cruz, étape intermédiaire entre Ericeira et Peniche, premier petit pépin velo : ma chaîne enclenche moins bien les changements de vitesse, jusqu’à dérailler, ce qui est inhabituel depuis que j’ai mon vélo. Il faut dire que nos engins sont mis a rude épreuve sur les routes portugaises (gravelle, pavés, sable, changements fréquents de vitesses). On identifie facilement le chaînon fatigué, qu’on retire en attendant d’atteindre un magasin de vélo (les plus proches sont tous derrière nous et nous sommes bien d’accord que nous ne ferons pas demi-tour).

Les routes demeurent des boites à surprise. Il est coutume que nous suivions d’abord une belle piste cyclable, avant de se retrouver dans un chemin de terre ou, la palme du pire chemin revient toujours à ce jour à … la piste de sable. Dans les villages, nous devons nous arrêter à chaque intersection pour vérifier quel embranchement prendre ensuite. Il n’est pas rare qu’il y ait 4-5 options, un genre de relais en étoile, dans lequel il est très facile de prendre la mauvaise rue. Cela participe à nous rendre très lents : environ 5 à 6 heures de vélo, pauses incluses, pour faire une trentaine de bornes en moyenne, par jour, ce qui représente de grosses journées de vélo. Nous avons par ailleurs du mal à partir tôt : le rangement chaque matin est assez long. À cela s’ajoute une météo de grisaille, parfois des averses. Bref, ce début à vélo est un peu plus ardu qu’anticipé.

Moral en dents de scie pour Jeff qui peine à se remettre d’un petit rhume attrapé probablement dû aux averses de pluie et la fatigue qui s’accumule, mais aussi à son chargement. La météo demeure constamment incertaine et la pluie menaçante, ce qui ajoute aux difficultés des chemins. Malgré des moments de découvertes et d’observations propres au voyage lent (une colonie d’escargots dans les hautes herbes, une vieille tour abandonnée au détour d’un chemin, entre autres), on avance avec des phases de doute. Enfin, lui. Moi, je continue de penser que le vélo est une super façon de voyager, même si ça vient avec son lot de défis. 

Nous arrivons à Peniche, où nous retrouvons des amis qui profitent des vacances scolaires pour nous rejoindre. Retrouvailles, visite des îles Berlengas accessibles en bateau (parc protégé avec de beaux points de vue et une petite crique à l’eau claire). Superbe malgré une météo grise et venteuse.

Les jours suivants, nous profitons de la présence de nos amis qui voyagent en voiture pour leur laisser un peu de matériel et les retrouver le soir, pour passer de bons moments ensemble. Passage par Óbidos, charmante petite ville où il est possible de faire le tour des murailles sans garde-fou, de se promener dans de petites ruelles aux pavage typique, dégustation de pasteis de bacalhau, beignets de morues, puis de Mon Chéri portugais, ou alcool de cerise dans de petits shooters de chocolat. Nous y rencontrons un couple de français qui voyagent également à vélo. L’occasion de prendre quelques bons plans en note, notamment l’application Komoot pour les trajets. Ils nous disent avoir eu presque seulement de la piste cyclable entre Porto et Óbidos ! Et les dénivelés sont beaucoup plus tranquilles que la partie que nous venons de traverser. L’espoir de retrouver le vrai plaisir du vélo se profilerait-il ?

Ce soir-là, je regarde de manière compulsive les prévisions météo : ils annoncent toujours de la pluie. Le découragement me gagne… Est-ce que nous devrions nous résigner et revoir notre projet de voyage ? Nous envisageons descendre dans le sud pour retrouver le soleil, mais c’est un gros changement de plan. Nous décidons de poursuivre, que nous ferons des pauses lors des averses, qu’on louera du dur au besoin. 

Mon amie Justine, cyclotouriste aguerrie, me souligne que le voyage, ce n’est pas des vacances. Qu’il peut y avoir des moments plus difficiles, que ça fait partie de l’expérience. Cela me fait du bien de l’entendre. C’est donc sur ses bons mots que nous poursuivons la route, malgré les défis…

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