C’est le 12 mai que nous entrons en Ouzbékistan, passant par la frontière de Osh. Cette frontière est fermée pour les locaux en raison de tensions entre les deux pays ; elle est toutefois ouverte pour les touristes.
Alors que nous quittons rapidement le Kirghizstan, les douaniers ouzbèques sont un peu plus pointilleux… Déclaration de biens, fouille de tous nos sacs et poches, vérification de la trousse à pharmacie et, contrôle des images contenues dans nos appareils photo. À ce moment, un douanier demande, sourire en coin : « Porno ? ». Deux heures plus tard, nous roulons enfin en territoire ouzbèque (notre intimité épargnée puisqu’ils n’ont rien trouvé de croustillant).
Au début, nous sommes sous le charme de ces villages aux maisons de pierres couleur sable avec, dans les rues, des enfants en costumes qui sortent de l’école, de vieilles voitures russes le plus souvent jaunes, blanches ou bleues, et des tuyaux jaunes qui desservent le gaz dans chaque maison. Nous apercevons encore quelques montagnes au loin les premiers kilomètres, puis tout devient plat, vraiment plat. Nous roulons en terre agricole, où les champs de coton dominent largement. Le charme n’est plus vraiment là…
Cependant, ce qui nous marque davantage, c’est la chaleur avec laquelle nous sommes accueillis. Je l’ai lu : il parait que les habitants de la vallée de Ferghana sont particulièrement accueillants et ça se vérifie. Nous avons régulièrement des sollicitations, que ce soit pour manger ou boire le thé, ou même dormir à la maison. Nous discutons alors de nos familles, de notre voyage. Les conversations finissent par se ressembler, mais nous apprécions grandement la valeur de chacun de ces partages, humains et sincères.
Nos hôtes veillent à chaque fois à ce que nous ne manquions de rien. Partout où nous passons, on nous offre à manger ! Au début, on mangeait par politesse ce qu’on nous mettait dans l’assiette. Puis, voyant que nous nous faisions resservir quoi qu’il arrive, nous avons arrêté de tout manger. Eux mêmes ne mangent pas autant ! Nous repartons à plusieurs reprises avec 4 ou 5 pains accrochés à l’arrière du vélo, ou bien avec des petites boules de fromage que l’on mange alors qu’on n’aime pas vraiment ça… C’est fort et ça fait une pâte dans la bouche difficile ensuite à avaler. La culture de l’accueil est bien différente de celle que nous avons observée, ou même vécue, en Asie du Sud-Est.
Il serait trop long d’énumérer ici chacune de nos expériences, alors je choisis de ne décrire que celle qui nous a le plus marqué. Il nous fera plaisir de partager les autres, de vive voix, à notre retour.
Nous avons rencontré un homme alors que nous étions assis à côté d’un petit bui-bui, à siroter un jus de fruits. L’homme s’arrête, discute un peu avec nous et nous propose un lit dans son bureau pour la nuit. Il est le boss d’une usine de coton, proche de la ville de Ferghana. Le temps d’arriver, Monsieur a déjà appelé plusieurs de ses enfants (il en a 7) et petits-enfants (il en a 14). Séance photos avec la famille, visite de la fabrique, séance photos avec les employées, thé. Puis nous partons manger chez l’une des deux femmes de Monsieur, avant d’aller ensuite saluer la deuxième. Elles vivent dans deux maisons séparées, mais partent en vacances ensemble car Monsieur travaille beaucoup et ne s’octroie que peu de loisirs. Nous sommes finalement retournés dans le bureau boire un dernier thé, regarder quelques photos de famille, écouter Jany Laffee, un groupe américain dont notre hôte est fan (je vous le conseille, on est devenu fan aussi).
Le lendemain, deux de ses filles viennent nous chercher pour nous emmener visiter la ville de Ferghana, que nous n’avions pas prévu de visiter. Nous passons un bon moment dans cette ville, plus par plaisir d’être ensemble que pour le charme de la ville, toute refaite.
Petite anecdote : alors que j’avais chaud et après l’avoir dit, les filles ont insisté pour que j’enlève mon gilet. Moi qui fais constamment attention à cacher le plus de peau possible comme c’est la coutume ici… Cette matinée là, je finis avec épaules nues et tattoo visible. J’ai ressenti dans leur insistance une envie de rébellion, je me suis sentie utilisée comme une arme pour revendiquer la liberté des femmes, dans une région du monde où elles n’ont clairement pas le même statut que nous avons chez nous !
Car oui, une des facettes de la vallée de Ferghana est son conservatisme, qui ne laisse pas une grande place à la femme… Je peux en témoigner. Bien que je ne veule pas faire de mon expérience une généralité, il m’est arrivé plusieurs fois d’être littéralement ignorée ou pire, méprisée, bien plus que par après, dans les autres régions du pays. Certains discours d’hommes ne cachent pas non plus leur dénigrement du sexe dit faible… D’ailleurs, je suis bien souvent la seule dans les restaurants, alors que les femmes travaillent dans les champs. Heureusement, je crois que cela change un peu dans les villes, où les femmes de familles plus aisées accèdent davantage aux études.
Et puis, il y a aussi eu quelques mauvaises rencontres… qui ne feront pas de la vallée de Ferghana notre meilleur souvenir de voyage. Rencontres qui ont toutes en commun la consommation abusive de vodka ! C’est ainsi que le premier soir, nous avons dû quitter la maison où nous avions été invités à passer la nuit car notre hôte, le père de famille, au début très accueillant et aux petits soins, a finalement complètement changé de comportement après être allé boire quelques verres de vodka, entre hommes, avec Jean-François. À leur retour, l’homme n’est plus le même : devenu paranoïaque, il nous accuse de ne pas être qui nous disons être et finit même par sortir un couteau de sa ceinture ! Ne nous sentant à ce moment plus en sécurité, nous décidons de partir, bien qu’il fasse déjà nuit.
Il faut nous imaginer un peu secoués après cet épisode, survenu le premier soir. Bien que nous ayons refusé de nous laisser submerger par cette mauvaise expérience, il a été plus difficile de faire confiance aussi facilement par la suite… Et des mecs saouls et lourds, on en croise un peu trop (le pire ayant été de très loin le paranoïaque, je vous rassure). Cela a beaucoup joué dans le fait que nous ayons un souvenir amer de notre passage dans la vallée de Ferghana. Et ce, malgré les autres très belles rencontres…
ah tres beau recits mais comme celà a du vous marquer ..l’alcool c’est terrible mais heureusement que la suite vous donne du baume au coeur. maintenant je comprends qu’il est preferable de rouler a plusieurs . continuez d’etre bien prudent .. avec la difference de culture je comprends . je vous admire car c’est avec des personnes comme vous que nous vivons la realite. a votre retour vous pourrez tout relater . merci encore
MAIS ça me fait fremir…ma tite XAVIERE et JEF.