Nous sommes arrivés à Tashkent le dimanche 17 mai au soir. Le lundi suivant, nous voulons croire que la nouvelle semaine nous sera plus propice. Après avoir régularisé notre enregistrement manquant (auprès du bureau de l’immigration qui se trouve à la gare), nous sommes enfin acceptés dans un hôtel. Ouf ! C’est déjà un premier élément qui va vers un mieux à venir.
Tashkent, la capitale du pays. Nous profitons surtout de nous reposer, de prendre du bon temps et de visiter quelques sites d’intérêts. Mais surtout de nous reposer…
On ressent très fortement l’influence russe dans la ville. Bien que moins soviétique que Bishkek. En effet, l’architecture est tout de même assez récente puisque Tashkent a été reconstruite après un tremblement de terre dévastateur en 1966. Dans le quartier où nous demeurons, on se croirait dans une grande ville occidentale, bétonnée à souhait ! De grandes avenues, des magasins flambant neufs, des habitants aux traits définitivement plutôt russes (parfois pas mal refaits), et la présence en masse de la police.
Oui, la police est partout. Dans le métro, la gare, dans les rues, partout. Et les contrôles d’identité fréquents. Jean-François et moi sommes partagés entre le sentiment de sécurité qu’on peut sentir du fait de cette forte présence policière et le sentiment contraire, pensant que cela pourrait laisser présager que la sécurité est limitée pour nécessiter un tel déploiement. Toutefois, je dirais que le premier l’emporte. Puis la ville est calme depuis les derniers attentats de 2004.
Nous aimons le bazar de Chorçu. Un quartier à part du reste de la ville. Il aurait été particulièrement épargné lors du tremblement de terre de 1966. Nous nous y promenons, complètement plongés dans un autre monde, à une rue seulement de marche de la ville neuve. On zigzague entre les différentes allées, les différents stands. On pourrait y avoir un cours d’anatomie avec ces carcasses étalées à la vue de tous. Il n’y a que l’embarras du choix pour choisir son pain, ses légumes, ses fromages, ses samsas (petit pain fourré local), etc.
Nous irons également voir la madrasa (établissement d’enseignement) Barak-Khan et la mosquée Tilla-Sheikh, qui font partie de l’ensemble Hast Imam, pas très loin du bazar de Chorçu. Une grande place nous permet d’observer ces bâtiments aux briques beiges et aux coupoles bleues turquoises. Des hommes sortent en groupe. C’est la fin de la prière.
Le jour de notre départ, nous allons rapidement « admirer » la statue d’Amir Timur, que l’on connaît chez nous davantage sous le nom de Tamerlan. Grand conquérant, il demeure encore aujourd’hui très respecté des Ouzbèques. Certains le compareront à notre Napoléon.
C’est le 20 mai que nous quittons Tashkent, en train, direction Boukhara. Un train de nuit. Tôt le matin, nous sommes déposés à 14 kilomètres de la ville. Nous faisons le trajet, entrons dans la ville, pour arriver dans le centre d’une vieille ville (classée au patrimoine de l’UNESCO) qui, une fois encore, nous renvoie à la période de la route de la soie. Et, c’est un coup de coeur ! Le coup de coeur qu’on attendait. La vieille ville est très pittoresque. Bon, on apprend après qu’elle a été reconstituée en grande partie, puisqu’elle a été bombardée par les soviétiques dans les années 20 (enfin… même sans les soviétiques, lorsqu’on s’intéresse à l’histoire de cette région du monde, on réalise vite que les villes ont toutes été assiégées, mise à feu et à sang, pour être reconstruites, et rebelotte). Plus de 2000 ans d’histoire, un si bel héritage… Nous sommes sous le charme ! Je le redis.
Entre repos, balades en fin de journée à la fraîche, bières en terrasse et visite guidée, nous profitons au maximum de notre temps à Boukhara. Nous en apprenons plus sur la vie au temps des caravaniers. Un mode de vie nomade qui exigeait de trouver place où dormir et se nourrir. On retrouve alors des caravansérails, construites pour accueillir les marchands, mais aussi des madrasas, toujours construites uniquement pour les garçons ; certaines pour les enfants des riches, les autres pour les enfants des pauvres. Des détails fins, sur une base étoile, ornent les murs de ces édifices que l’on trouve majestueux. Puis il y a les marchés, sous des bâtiments à coupoles, auparavant tout à fait spécialisés dans la vente d’un produit en particulier, par exemple le marché des chapeliers ou encore le marché des tapis. Aujourd’hui, plusieurs de ces constructions ont été reconverties pour abriter les boutiques d’artistes locaux (travail de la soie, coutellerie, céramique, etc.), ou bien pour vendre des produits tels des coussins ou des tissus brodés. Jean-François y trouvera un bonnet doté d’une belle touffe de mouton!
On peut aussi visiter le château de l’Émir, ou du moins sa demeure d’hiver, dans lequel on retrouve des tenues de l’époque. C’est-à-dire de grands manteaux pour les hommes, un pour l’hiver, un pour l’été. L’Émir pouvait y mettre des couches secrètes en dessous pour paraître plus imposant. Et pour les femmes, le voile intégral a longtemps été de mise, jusqu’à l’occupation soviétique.
Petit fait « cocasse » : l’écriture arabe à été utilisée en Ouzbékistan après la conquête islamique, avant de passer à l’écriture cyrillique et, enfin, l’écriture latine, qui demeure l’écriture officielle aujourd’hui.
Il y a quelques touristes occidentaux, mais davantage de touristes ouzbèques, venus en pèlerinage. Beaucoup habitent la vallée de Ferghana, région où l’on trouve peu de mosquées et ce, malgré le fait que la religion soit davantage pratiquée dans ce coin du pays.
Puis vient le moment où nous devons finalement quitter ce petit coin de tranquillité. Et nous repoussons chaque fois un peu le temps du départ. Car oui, rappelez-vous, notre avancée à vélo en terre ouzbèque n’a pas bien commencé. Et bien que cette semaine se soit très bien passée, il nous faut nous relancer dans la jungle que peut être la route, parfois… Nous appréhendons un peu malgré notre optimisme habituel…
Et, alors que nous nous lançons enfin, sur le bord de la route, nous apercevons, assis tranquillement à l’ombre d’un arbre, sur la terrasse d’un petit café, quatre autres cyclos : un couple belge, Alexia et Daniel, et un couple vietnamo-italien, Binh et Alessio. Il en faut peu pour nous convaincre de rester une nuit de plus à Boukhara et décider, plus tard, de partir tous ensemble le lendemain matin. Nous rencontrerons aussi, dans la même journée, Reece, un anglais qui voyage seul. C’est donc à 7 que nous quitterons Boukhara…
À suivre…